mercredi, décembre 08, 2010

Envoyer chier ses artistes (Malaise dans la culture - 2ième partie)

L’hiver dernier, j’ai publié une note en réaction au suicide de Marcel Simard (la liste s'est allongée au printemps dernier, lorsque Robert Mailhot est passé aux mêmes actes). Je faisais le constat que rien n’était plus inquiétant que de voir les artistes d’une société se donner la mort. Aussi je trouve qu’il n’y a rien de plus louche que de voir une société commencer à envoyer chier ses propres artistes. Que ce soit par les propos maintenant célèbres de Serge Henry; que ce soit par la bouche des animateurs de radio-poubelle ou que ce soit par la pléthore de commentaires qu’on peut recueillir sur des blogues grand-public style La Clique du Plateau, un message homogène se formule tranquillement : une (importante?) partie de la société québécoise envoie chier ses artistes, abhorre ses artistes, développe une abjection viscérale à leur endroit et à l’endroit de ce qu’ils représentent. Je ne me prononcerais pas sur les raisons apparentes de ce phénomène, ni non plus sur la nature du carburant de cette haine, à savoir le présumé mythe de l’artiste enrichi par les subventions, à savoir la figure la plus aboutie du vampire, celle du BS de luxe suçant l’argent du système pour écrire ses « inepties élitistes »; je veux simplement soulever le fait que nous atteignons une ère extrêmement inquiétante. Je voudrais trouver ce qui s’est passé dans la suite des événements pour qu’on en vienne à détester à ce point les artistes et les intellectuels, à les considérer comme des parasites absolument nuisibles. Je ne ferai pas de plaidoyer pour défendre ces derniers car je suis profondément convaincu que ceux qui les dénigrent sont irrécupérables. L’âge des Lumières est terminé. Il ne vaut plus la peine d’éclairer les masses : elles se complairont dorénavant dans un abrutissement cynique qui démonise le goût ou la capacité de réfléchir.

Si par ailleurs, nous nous considérons un tant soit peu artistes ou intellectuels, il ne nous reste plus que la confrontation. Nous nous devons d’être plus que jamais impitoyables dans nos démarches et plus jamais devons nous rechercher le consensus. Il faut faire peur; il faut faire mal. Ils nous ont sacrés parasites? Nous leurs seront plus que jamais dangereux.

lundi, décembre 06, 2010

L'Argument du chiffre...

...tel que publié sur TERREUR!TERREUR!

Procrastination oblige, j’ai fait le tour de quelques blogues et j’ai trébuché sur celui d’Élisabeth Tremblay via celui de Jonathan Reynolds. Dans une note intitulée Vous aimez la polémique, elle se porte au secours de la série Les Chevaliers d’émeraude, qui semble-t-il, se trouve à être la cible de pelletées de critiques. Son artifice défensif s’organise autour d’un argument que je ne peux plus entendre. Celui du chiffre. La série Les Chevaliers d’émeraude a conquis des milliers de lecteurs et a rapporté des millions de dollars à l’éditeur, affirme-t-elle (je ne met pas en doute l’information). Voilà deux qualités qui devraient stopper net tous ses détracteurs. Mais pourquoi faudrait-il qu’une vache à lait devienne une vache sacrée? Et pourquoi toujours nous remettre sous le nez l’argument du chiffre? On me dira que je ne comprends pas les impératifs financiers qui règlent la réalité des éditeurs? Wrong. Durant les 15 dernières années, je me suis impliqué dans les Jeunes Entreprises, j’ai suivi une formation au SAJE; je suis même allé perdre mon temps aux HEC, j’ai appris à rédiger des plans d’affaires et je gagne ma vie en vendant de la bouffe et du vin. Je suis peut-être le plus néolibéral de tous les littéraires que vous connaissez. Mais l’argument du chiffre, j’en ai vraiment marre. J’en ai marre qu’il soit l’indice ultime du succès littéraire, qu’on y ait recours comme argument salvateur pour tout texte possédant peu de qualités littéraires qui rapporte un tant soit peu à son éditeur. Comme s’il fallait créer de la richesse avec des livres « plus commercialisables » pour subventionner des livres plus obtus, « plus difficiles d’approche ». Vendre des livres; convertir des gens à la lecture, pour vendre plus de livres, pour convertir d’autres gens à la lecture. Faire de la lecture quelque chose d’aussi accessoire que superficiel. En fait, créer un besoin. Pour ensuite y répondre par la publication diluvienne de blockbusters littéraires dont l’existence ne change absolument rien au fait que d’autres sortes de livres se lisent et s’apprécient. Et je ne juge pas ce type de littérature (mais personnellement, être pogné pour en écrire, je m’endormirais sur mon clavier); je ne la juge pas dans la mesure où elle demeure à la place qui lui sied et dans la mesure où elle reste consciente de ses limites. Les Blockbusters littéraires ne sensibilisent pas plus à la lecture que les Backstreet Boys sensibilisent à la musique. Pour finir, je veux clore tout ça avec une belle vérité de La Palice – car tout blogue qui se respecte en est infesté – à savoir que le succès commercial d’un livre n’a rien à voir avec ses qualités littéraires. Transportons-nous dans le monde musical ou dans le monde du cinéma et les choses seront peut-être plus apparentes.

lundi, novembre 15, 2010

Foxer l'Expozine

Un remerciement sincère aux Productions Arreuh qui ont assuré un peu de visibilité au Porte-Abîme 3 à l'Expozine 2010.  Le Mercenaire fait la promesse qu'il y sera l'an prochain, en chair et en os.

mercredi, octobre 20, 2010

Pour en finir avec la littérature de genre...

Le réflexe taxonomique qui pousse à vouloir tout classifier et à tout étiqueter s’est répandu de façon épidémique dans tous les domaines des sciences humaines. La littérature, comme souvent, n’a pas été épargnée par la contagion.
Lorsqu’on est légèrement au courant de comment le savoir se construit et se finance à l’intérieur de ses institutions, on peut s’imaginer que la job de classage que représentait – et représente encore – la littérature à dû faire saliver une bonne tonne de chercheurs universitaires. Un des genres littéraires qu’on a le plus subdivisé en catégories, qu’on a morcelé, haché, effiloché en une tonne de mouvements, de courants, c’est sûrement le roman. Et quand d’autres chercheurs se sont mis à réfléchir sur les sous-genres du roman, ils ont émis une pléthore de définitions (tout a fait discutables, by the way) et se sont efforcé de dégager des caractéristiques qui leurs répondraient. Sont tranquillement apparues des étiquettes telles que «roman policier», «polar», «science-fiction», «fantasy», «roman gothique».
Et c’est là que le chien s’est fait fourrer. Sournoisement, les écrivains et les éditeurs se sont mis à prendre ces caractéristiques pour du cash. Les étiquettes produites étaient si fortes qu'on ne pouvait plus gérer la production littéraire sans avoir y recours systématiquement. À un point tel que la première question que se pose un écrivain après avoir rédigé une couple de pages de son nouveau manuscrit ressemble à : «Dans quel genre suis-je entrain d’écrire?» Une fois le supposé genre identifié, l’écrivain fera tout en son pouvoir pour adapter son travail aux caractéristiques de ce genre. L’éditeur publie de la littérature de genre fait la même chose. En plus de refuser les mauvais manuscrits – ce qui va de soi mais n’est peut-être pas toujours vrai – il refuse les manuscrits qui ne se plient pas au genre exploité. En fait, non. Il faut dire «qui ne se plient pas totalement aux règles du genre exploité».
Il faut admettre que tout ça est extrêmement problématique. Comment peut-on dire «ceci n’est vraiment pas de l’horreur» ou «ceci n’est pas vraiment de la science-fiction». Ces deux affirmations impliquent qu’il existe une définition précise concernant les genres romanesques. Et si on écrit dans l'intention de correspondre à une définition, entendons-nous qu’on que ne fait plus qu’émuler, on ne fait plus que copier; on n’invente plus rien (ça ce n’est pas tellement grave) mais on épuise les textes ou les récits pères desquels certains critiques ont extraits des caractéristiques pour former des entités théoriques (qui n’a rien à voir avec l’acte d’éditer ou d’écrire proprement dit), les différents genres du roman.
Donc! Vous écrivez de la littérature de genre? Dropez vos crayons right now ou lâchez vos macbook pro à l’instant! Voici 5 choses que je veux que vous fassiez :

1) Arrêtez de penser en termes de genres littéraires. Vous allez choper le cancer. Vous pensez que votre récit n’est pas réaliste et que de l’inscrire dans un genre parent du fantastique le sauvera? Faux, un bon récit n’a pas besoin d’être sauvé - arrêtez d'utiliser les conventions d'un genre, peu importe lequel;
2) Pour tous ceux qui croient faire du fantastique ou de l’épouvante, évacuez immédiatement de votre vocabulaire des mots tels que ténèbres,  obscur, nocturne, déchu, damnation, écarlate, sanglant, folie, démoniaque, bestial, sépulcral... Utilisez-les plutôt si vous croyez faire de l'auto-fiction.
Ne parlez plus de vampires ni de démons.
Pulvérisez les concepts de mal et de bien et surtout, ne les faites plus intervenir l'un contre l'autre dans une lutte sans merci. Oubliez tous vos principes moraux, de peur que vous les inculquiez à vos personnages ou à vos créatures. Abandonnez le thème de la folie : vous n’avez probablement aucune idée de quoi vous parlez. Renseignez-vous pour vrai avant de parler de pyschopathe ou de tueurs en série (Là, je ne parle pas d'écouter Dexter en boucles). À moins de connaître à fond le mythos judéo-chrétien et de pouvoir y recourir d’une manière complètement neuve, cessez à l’instant d’y puiser symboles, fables, figures etc.
À l’instant, j’ai dis!
3) Pour ceux qui pensent faire du Fantasy, faites cet examen de manière répétitive, jusqu’à ce qu’il s’assimile à vos réflexes les plus reptiliens.
4) Pour ceux qui croient faire de la science-fiction, allez tout de suite lire l’introduction de The Left Hand of Darkness d'Ursula K. Le Guin; arrêtez d’asseoir tout votre travail sur le novum (la bébelle super-originale qui se trouve au coeur de votre « vision réaliste de l’avenir»). Vous ne faites pas de la recherche en sciences : vous écrivez des histoires. Et surtout, s’il vous plaît, intéressez-vous juste un peu à la poésie et aux «usages atypiques» de la langue. Aussi, informez-vous sur les anciens mythes. De préférences, les moins connus.
5) Lisez plein d’auteurs différents provenant d’époques différentes. Brûlez Tolkien et Asimov. Comprenez que l’imaginaire doit prévaloir sur l’affiliation aux genres. Soyez perspicaces et vous allez voir que vos «romans de genre» préférés sont, en fait, inclassables.

Devoir pour la semaine:
Lire Mister B. Gone de Clive Barker, The Road de Cormac McCarthy et Dondog d'Antoine Volodine et les classer par genres romanesques. On va rire.

jeudi, octobre 07, 2010

Du papier à l'hypermédia

J'ai appris ce matin, non sans une certaine joie, que le numéro de Moebius auquel j'avais participé est dorénavant disponible en version électronique. Sous le thème très inspirant de l'espérance de vie, Moebius # 120 a été piloté par Patrick Brisebois. Si ça vous chante, vous pouvez lire ma nouvelle intitulée «Viande froide sur l'étal» ici.

mercredi, septembre 15, 2010

Faire des livres II: Les Orphelins

Durant l’été 2007, j’ai entamé l’écriture d’un recueil de nouvelles plus ou moins fantastiques. C’est un des rares travaux d’écriture que j’aie porté à terme. Un ami éditeur m’avait proposé de lire la chose et d’ensuite m’aider à trouver preneur. Après m’avoir confié – à ma grande joie – que plusieurs textes recelaient un potentiel évident et que l’un d’entre eux méritait d’être transformé en roman, il me fit part de la conclusion suivante :

«Je me demande qui, ici, peut te publier. Tu ne corresponds à la ligne éditoriale d’aucune maison d’édition et si l’une d’entre elle veut te publier, je doute qu’elle sache comment bien promouvoir ton texte.»
Bref, ça voulait dire qu’ici-bas, on n’était pas éditorialement équipé pour faire vivre mon texte.
Depuis, quand j’écris, je ne suis pas capable de m’enlever ça de la tête. Je suis orphelin. Éditorialement parlant.
Quand Ed a sorti Prison de poupées, on était tous très heureux pour lui. Pour ma part, je me sentais vengé par les événements. Un ami, dont les écrits avaient souvent été jugés impubliables – entre autre à cause de leur trashness avouée – publiait enfin chez un éditeur «reconnu» . Ensuite, les choses se sont corsées.

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mercredi, août 25, 2010

Archéologie

Voici un petit souvenir du temps où je dessinais encore:



Ça fait je ne sais combien de temps que mon blogue sur platform27 a sauté sans crier gare, emportant dans le vide tout le journal de production du 3ième Porte-Abîme. Je posterai une fois de temps à autres, des glimpses de cette époque glorieuse.

jeudi, août 19, 2010

Ce que Henry Miller peut faire pour vous

Ça m’a pris un moment avant de devenir chum avec Henry Miller. J’ai essayé deux fois Black Spring, sans succès. J’arrêtais après trente pages. Le Doc (et beaucoup d’autres) le tenaient pour un auteur clef. J’avoue que la peer pressure était forte. Durant mes premières tentatives d’infiltrations au cœur de l’impressionnisme étourdissant de Black Spring, je cherchais en vain cette fascination qu’ils avaient tous, je voulais me prêter à la contagion sans pourtant choper la fièvre.


J’ai dû attendre Tropique du Cancer. Là, Miller m’a mordu. Ensuite, je suis retourné à Black Spring (Printemps noir, faudrait dire, car comme l’autre, je l’ai lu en français) et je l’ai bouffé tout cru. Je me suis plongé dans Tropique du Capricorne, en anglais cette fois, parce que vous ne le croirez pas, Miller est fuckin plus limpide dans sa langue à lui. Là, je suis assez creux dans Sexus, le premier des trois tomes de sa Crucifixion (en rose), sa Recherche du temps perdu, le témoignage de sa mutation, sa révélation – mettons ; le témoignage résolu qu’il se ferait écrivain et rien d’autre.
 
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lundi, août 02, 2010

Valhalla Rising ou ce qu’un trailer m’inspire



À cause de mes appétences pour le folklore nordique, pour le souffle grandiloquent des mythèmes chrétiens et surtout pour les quêtes métaphysiques limites vieux-jeu, je tremble de voir ce film. Vite de même, ça a l’air d’une re«montée» des enfers païens; de visu, on dirait l’errance puis la consécration d’un dieu nietzschéen – le héros borgne est une référence directe à Odin – un dieu nietzschéen, disais-je, qui n’est pas encore amputé de sa part néfaste, un dieu qui ne pardonne pas mais se venge, un dieu de colère qui préfère tuer les hommes que les aimer, un dieu affamé de sacrifices. On dirait aussi une fable épique où s’agiteraient désespérément ceux qui veulent à tout prix être sauvés, qui refusent de voir la révélation - soit que rien de doit être sauvé et que la promesse salvatrice est une parole creuse.

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mercredi, juillet 28, 2010

The Great Modern Trendkill

Toutes ces hordes d’écrivains qui prirent le XXe siècle de vitesse laissèrent derrière eux des champs dévastés, couverts de sable pour que plus rien n’y pousse. Ils domptèrent ce siècle horrible et lui sortirent les entrailles par la gueule, lui arrachèrent la chair avec leurs doigts, lui sculptèrent le muscle avec leurs hachoirs déjà émoussés et dessinèrent sur son dos meurtri les glyphes flamboyants de l’apocalypse en plein déploiement.

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mercredi, juin 30, 2010

Une première note sur TERREUR!TERREUR!

Y a-t-il quelque chose de plus essoufflé et de moins Web 2.0 que la littérature? Lorsqu’on constate la perte de vitesse vertigineuse qu’elle subit par rapport aux autres modes d’expressions narratifs, on ne peut que se réjouir pour ceux qui détestaient lire. La littérature vit une crise et je ne vous apprends rien. Non pas parce que les gens lisent moins – ça c’est faux; ni à cause de l’arrivée du e-book (sacré objet d’apocalypse littéraire par de nombreux penseux). La crise vient tant d’une permutation interne à la littérature (voir la note Se contenir et redevenir éditeur) que de la perte d’un goût essentiel pour toute activité – je n’aime pas le mot mais je suis à court de termes – artistique. Ce goût qui s’en va s’effaçant, c’est celui du risque.
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mercredi, avril 28, 2010

Ce que les profanes peuvent apprendre aux initiés

Hier soir, j’ai enfin brisé la glace en matière de lecture publique. Apparemment, j’ai très bien fait ça. Pour ma part, j’ai bien aimé l’expérience et ça m’a donné envie de récidiver. J’ai lu deux petites fictions de mon crû, Histoire de couple (version longue et peaufinée d’un fragment que j’ai publié dans le Jardin aux eaux mortes) et Le Bus de nuit (histoire que j’avais d’abord préparée pour un recueil de nouvelles qui ne verra jamais le jour et que j’ai retouchée pour la soirée).
Mais surtout, ceux qui ont vraiment bien fait ça, ce sont ceux qui étaient assis dans la salle : leur écoute était phénoménale. C’était savoureux de lire dans un silence aussi limpide et aussi attentionné. Paradoxalement, l’assistance ne comptait que très peu d’initiés à ce genre de soirée. Je commence à remarquer que les profanes ont plus de respects que les adeptes pour ce type d’événement. De nombreuses fois je me suis rendu à des soirées de lectures organisées par des maisons d’édition établies ou présentées dans le cadre de festivals culturels. Il régnait dans ces soirées – qui jouissaient tout de même d’une certaine aura d’officialité, tant par la nature du public que par le statut des lecteurs – un vacarme tel que les lecteurs étaient littéralement enterrés par l’assistance (essentiellement composée de poètes, d’auteurs & de «gens du milieu») qui n’en avait, faudrait-il le croire, rien à cirer d'écouter.


L’écoute et la curiosité des gens qui, hier soir, sont venus découvrir ce type de happening m’a vraiment encouragé et me confirme la nécessité de sortir des cercles fermés du «milieu». Les gens veulent encore être surpris, être étonnés. Les gens aiment encore se faire raconter des histoires. Voilà ce que j’ai appris hier soir. Et voilà ce qui me fait sourire aujourd’hui.

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Le 27 avril était aussi la date de sortie des Soleils suspendus de François Rioux.

C’est publié chez Le Quartanier (un remarquable esthète du livre). Allez zyeuter ça.

mercredi, avril 07, 2010

Nouvelles à boire debout



Le 27 avril prochain, Marie-Ève Turgeon (L'intimité de la viande) organise une petite soirée de lecture. En plus de moi  - qui, for the record, ferai mon baptême de feu en matière de lecture publique - il y aura Martin Ouellet a.k.a Docteur Triton, Edouard H. Bond et bien-sûr, Marie-Ève Turgeon. Au programme, de petites histoires qui relèvent du B, du déviant ou de l'étrange. En espérant vous voir en grand nombre.

Infos du flyer:
27 Avril 2010 à 2ohoo - Entrée libre - Contributions volontaires
Bar Le Grillon, 1950 Ste-Catherine Est, coin Dorion (à peu près en face du metro Papineau)

Conception du flyer : Marlène Paquin

mercredi, mars 31, 2010

Malaise dans la culture – 1ère partie

En 1929, Sigmund Freud publiait Malaise dans la culture (aussi intitulé Malaise dans la civilisation), une sorte d’étude du cas humain qui tente de débusquer les raisons qui poussent l’homme à s’autodétruire; sorte d’étude, dis-je, au terme de laquelle Freud formule l’hypothèse suivante : ce qui peut sublimer les pulsions, c’est l’Art. Car, d'après Freud, dans l’homme font rage des pulsions : des pulsions de vie, des pulsions de mort. Bref, sans trop abréger, Sigmund suggère que le salut de l’homme, c’est l’Art. À l'époque, ce n’était pas peu dire. Mais les horreurs qui marquèrent les deux tiers du XXe siècle prouvent que son hypothèse n’a trouvé que trop peu de disciples.
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Moralement épuisé et absolument déçu par l’Amérique qu’il a vu se dégénérer tout au long de sa vie, cette Amérique qui s’est avortée elle-même, grosse de ses bouillonnantes années ’60, cette Amérique seulement rêvée et depuis longtemps évanouie, Hunter S. Thompson (écrivain de la contre-culture & journaliste) met fin à ses jours en février 2005, trois mois après la réélection de George W. Bush, en se brûlant la cervelle.
Pour des raisons qui, dans leur essence, ne sont pas tellement différentes, le 15 mars 1977, Hubert Aquin s'est lui aussi flambé la cervelle. La mort d'Aquin annonce toute une série de décès similaires, série qui se rend jusqu’à nous, en 2010, le plus récent étant celui de Marcel Simard.
Le message que laissent tous ces suicides est aussi triste que complexe. Un élément qui perd de son utilité, qui se sent rejeté par l’ensemble, déçu par l’ensemble, aliéné de l’ensemble; l’élément qui se sent vidé de sa substance, par une force naturelle, se supprimera ou sera supprimé. Une tendance s’exprime tranquillement dans les sociétés nord-américaines : l’Art perd sa raison d’être, l’Art tend à se supprimer lui-même. Et donc ses disciples, les artistes.
Je trouve qu’il n’y a pas rien de plus alarmant pour une communauté que de voir ses artistes se suicider. Mais attention! Il ne s’agit pas ici du Mal qui la tenaille : il ne s’agit que d’un symptôme. Le symptôme d’une gangrène souterraine, gangrène qu’on décèlera beaucoup trop tard, lorsqu’elle aura bouffé tous les membres et tous les organes essentiels à la vie.
Peut-être que l’Art a fait son temps? Peut-être que nous sommes assez grands maintenant, nous, peuples riches et industrialisés pour s’en aller et passer à autre chose? Peut-être? Non?

Même le petit garçon dans The Road essaie de jouer de la musique.

jeudi, mars 04, 2010

Se contenir et redevenir éditeur

Vous ignorez à quel point je pourrais noircir ce blogue de notes pleines de fiel. 2 ou 3 par jour, presque. Mais attention, elles seraient pleines d’un fiel distillé, mis en bouteilles, un fiel digne de grandes cuvées. Un fiel travaillé à même la vigne; du sang de cailloux, quoi. Pourtant, je me retiens de tirer à boulets rouges sur tout ce qui m’indigne. Vous aurez deviné ma cible principale : le microcosme littéraire québécois. Comme beaucoup d’autres, ce qui s’y passe me ronge les parois stomacales. Les brûlements d’estomac, c’est le propre de tous ceux qui restent (à tort ou à raison) dans l’ombre. Peut-être que si je vidais quelques chargeurs argumentatifs sur certaines têtes qui selon moi, manquent tout à fait d’autorité critique et de talent pour s’imposer à ce point, je brasserais un peu de merde et ce blogue serait une destination-rêve pour tous ceux qui ont leur grain de sel à cracher dans la soupe. Mais je n’aime pas ça, brasser la merde. Je préfère brasser autres choses. Des idées, genre.
À scander des paroles venimeuses, je préfère garder le silence. En fait, tout ceux que je connais qui sont aussi aigris que moi, gardent eux aussi le silence. On reste les bras croisés, dans notre coin de la salle, en observant les choses aller, en espérant que quelqu’un se plante, fasse rire de lui, que quelqu’un se réveille et dise : «Ça fera, les imposteurs!» Mais non. Le mélange tient, la chorégraphie se poursuit sans trop d’anicroches. On hésite entre rire ou pleurer.
En me calmant, je suis venu à deux conclusions:

1) La littérature connaît en ce moment un décentrement historique : elle est de moins en moins consommée par des lecteurs, mais de plus en plus par des téléspectateurs, des websurfeurs, des auditeurs; elle est de moins en moins écrite par des écrivains mais de plus en plus par des script-éditeurs, des scénaristes, des chroniqueurs, des journaleux, des bacheliers en communication. D’ailleurs, je le tiens de la bouche de certains professeurs, (faites-en ce que vous voulez) la littérature comme objet d’étude serait sur son déclin; dans l’avenir on s’attardera davantage aux récits (et les récits, ça transcende n’importe quel médium, que ce soit le cinéma, la vidéo, la webtélé, la télé, le livre, etc.).
2) À l’automne, je vais ouvrir une bannière d’édition toute neuve et reprendre du service. Ça vaudra mieux que me faire du sang d’encre et de couver un cancer.

mercredi, février 10, 2010

La Bande-annonce

Un petit souvenir de novembre 2006.

mercredi, février 03, 2010

Les choses en marche

Avant de tout déménager ici, avant de changer de navire, je me suis demandé jusqu’à quel point il était encore nécessaire pour moi de poursuivre ce blogue. Cette question en cachait une autre. Est-ce qu’un jour, je vais refaire des livres? Les lendemains du Porte-Abîme 3 puis des Histoires Incrédibles m’ont longtemps semblé être la conclusion de tout cet effort éditorial, la mise au noir d’une vision puissante qui avait fini par m’essouffler et par s’essouffler. J’ai mal interprété tout ça. De 18 à 23 ans, j’ai été extrêmement actif et j’ai piloté beaucoup de projets. Je croyais que s’il devait se produire quelque chose de majeur, de significatif, ce devait être dans l’espace ou directement à la suite de ces 5 années. Comme un zélote déçu par son messie, je me suis découragé. Mais lorsque tout s’est arrêté, lorsque j’ai tiré la plogue, j’ai eu la prétention de croire que tout cesserait, que c’était une mise en terre. J’ai eu pourtant tord d’y croire. Les choses sont en marche, qu’on le veuille ou non. Croire que d’un simple déclic psychique, on peut passer de l’animé à l’inanimé, c’est faux. Le travaille se fait beaucoup plus sournoisement. Et ce qui dort n’est pas mort. Et voilà ce qui m’arrive. Je dors. Je suis entre deux lieux. Je suis en transit. Vieillir ou mûrir, c’est passer de la puissance nerveuse à la force tranquille. L’édition me manque. Je finirai par y revenir.